Créé le 23 janvier 1730 par les Comédiens Italiens, le Jeu de l'Amour et du Hasard était la onzième pièce que Marivaux confiait à cette compagnie. Au dire du Mercure, elle remporta un très grand succès. Sitôt après l'absorption du Théâtre-Italien par l'Opéra-Comique, comme le Jeu de l'Amour et du Hasard attirait encore des spectateurs, les Comédiens royaux décidèrent de le mettre à leur affiche ; mais, malgré la précaution qu'ils prirent de changer le nom d'Arlequin en celui de Pasquin - car alors aucun d'eux n'eût accepté de revêtir le costume bigarré de ce personnage de la comédie italienne, - l'ouvrage parut trop léger dans le cadre sévère et pompeux de la première scène française et choqua ses habitués. Représenté seulement de loin en loin, à partir de 1796, le chef-d'oeuvre de Marivaux ne tarda pas à sombrer dans l'oubli En vain Mlle Desroziers essaya-t-elle de l'en tirer, pour ses débuts, le 25 août 1802. C'est seulement dix ans plus tard que le Jeu de l'Amour et du Hasard put être repris et s'inscrire au répertoire de la Comédie Française, sous l'influence de charmants auteurs, tels que Lebrun et Hoffmann, qui, s'inspirant de la formule si injustement discréditée de leur devancier, avaient créé tout à la fin du XVIIIe siècle et à l'aube du XIXe ce genre charmant : la comédie, à la fois d'intrigue et d'amour, dite "marivaudante" ; et grâce aussi à la célèbre sociétaire, Mlle Mars, laquelle, ayant trouvé dans le personnage de Silvia son rôle préféré, le joua sur le Théâtre-Français, de 1812 jusqu'en 1841, avec le plus vif succès.